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lundi 22 mars 2021

Pouvoir et puissance...

En terminant le dernier livre "Aux origines de la catastrophe" de Servigne et Stevens, je vais revenir sur un des textes qui parle de pouvoir et de puissance.


 

Le pouvoir, c'est la capacité dévolue à une personne ou un groupe, d'utiliser le commandement mis à sa disposition, pour décider et ordonner une action (pouvoir d'un État, d'un "chef", de l'argent, de la Loi). On "prend" le pouvoir et on l'exerce. 

C'est le "pouvoir sur..."

La puissance, c'est l'énergie d'un groupe qui agit avec force pour orienter, décider puis réaliser ou faire réaliser un projet commun. Elle intègre le développement de potentialités émancipatrices, d'évolution, la réalisation de "possibles". 

C'est le "pouvoir de...."

La puissance devrait donc permettre de "pouvoir faire".

"Pour paradoxal que cela puisse paraître, la puissance est le fondement de tout "pouvoir faire", tandis que ce que nous nommons habituellement le pouvoir n’est autre qu’un des lieux de l’impuissance, permettant, tout au plus, de récolter l’usufruit de la puissance d’autrui." (Miguel Benasayag-philosophe libertaire). 

En cela, cette citation reprend les réflexions de Spinoza, qui parle de "puissance d'agir" et de préciser que concernant le pouvoir,  il dépend si on est dans le "pouvoir sur" (domination) ou "le pouvoir de", ce qui revient à la puissance d'agir.


Le pouvoir aux gouvernants, la puissance au peuple

Pour ce qui concerne la chose politique, à ce jour, le pouvoir est issu de la pyramide régalienne (notamment en France avec la Vème République), qui s'exprime avec la "Délégation de Pouvoirs" aux grands commis de l'État qui sont censés exécuter ce que le pouvoir leur demande de faire. 

Cette verticalité de pouvoir de décision qui ensuite délègue et ordonne l'action est en effet plus simple et rapide. Mais est-elle  souhaitable dans une démocratie?

La vraie démocratie se passe volontiers du pouvoir, pour mieux agir avec puissance. Elle requiert la cohésion du groupe et son émancipation. Le contraire d'une domination aliénante.

Question: le pouvoir supposé représentatif peut-il laisser place à une puissance démocratique?

Vers une puissance démocratique

La définition d'une démocratie est "le pouvoir du peuple par le peuple", ce qui induit la réelle puissance du peuple à débattre, décider et agir selon ses propres décisions (prises par consentement bien évidemment - voir ICI). 

Or, nous sommes dans une démocratie dite "représentative" donc très indirecte car nos représentants sont élus à une majorité toute relative (compte tenu des reports de voix, votes blanc et non votants), et ce pour 5 ans pour la gouvernance de la France, ou 7 ans pour celle des communes. Dans l'intervalle, le peuple est supposé ou faire confiance à ceux qui ont été élus par au mieux 30% des habitants, ou manifester sa désapprobation quand il se sent trahi par le pouvoir mis en place.

La véritable démocratie est beaucoup plus directe et ne peut exister qu'à partir d'assemblées citoyennes dont les membres sont tirés au sort parmi les habitants, chacune en charge d'un sujet (l'habitat, l'environnement, la gestion des déchets, l'école, la santé etc...) et décisionnaires pour appliquer ou faire appliquer dans les faits leurs décisions. 

Ces assemblées citoyennes nécessitent bien sûr des étapes de formation, d'expertises de faisabilité et de débats suivis de décisions prises par consentement. C'est cela la puissance.

L'exemple de la Convention Citoyenne pour le Climat, supposée être décisionnaire sur l'application des décisions prises en est le meilleur exemple récent. Sauf qu'à ce jour, le Président de la République (porteur du "pouvoir sur..."), a décidé de ne valider que 75 propositions de la CCC sur 149.

La CCC avait donc la puissance (de réflexion, d'arbitrage, de propositions justifiées), mais pas le pouvoir de faire.

Cet espoir déçu d'une possible démocratie issue de la puissance du peuple s'est transformé en colère issue, elle, de l'abus du pouvoir des dirigeants.


Rêvons d'une société où les décisions prises en commun par les intéressés permettraient de rétablir la puissance du peuple aux dépends du pouvoir sur celui-ci. Nous pourrions alors avec bonheur redonner ses lettres de noblesse au pouvoir... de faire!


 


 

 

 

 

 

 

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