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samedi 31 août 2019

Utilité et complémentarité

Les mondes de l'économie, du travail, de la consommation et éducatif sont fondés sur le "toujours plus" et la "compétition", autres façons de parler du besoin frénétique et addictif de surabondance, mais aussi de lutte contre l'Autre, pour être le plus fort, le plus riche, le plus possédant, le plus intelligent, le plus... Bref le dominant!
Cette déformation sociétale est préjudiciable à la solidarité et l'entraide. Or, depuis le plus jeune âge, on nous met dans ce moule qui façonne notre comportement futur. 
Chacun le sait, mais "Business as usual" est devenue la norme fataliste à laquelle il faut se conformer pour ne pas être rejeté par la société ou au mieux taxé d'original-utopiste-rêveur.
Car c'est en effet le quadriptyque éducation-travail-économie-consommation qui est en jeu. Il s'agit bien d'un enjeu politique majeur dont le fonctionnement implacable explique bien des choses...
Je ne traiterai ici que des aspects économique et travail, donc consommation qui en est le corolaire. 
L'aspect éducation, je le réserve pour un prochain article.

Marché roi, compétition, concurrence
Une économie de marché est fondée sur la compétition avec comme règle "que le meilleur gagne". Le meilleur, c'est en général le plus malin, celui qui aura réussi à comprendre le fonctionnement des lois du marché et les manipuler à son profit au dépens des autres, s'offrant de cette façon la suprématie du pouvoir. 
C'est ce que le traité européen de Maastricht appelait "la concurrence libre et non faussée", parce que, quand même, il faut quelques règles à la concurrence pour que la compétitivité reste reine! Notons cependant que cette mention ne figure plus dans les objectifs de l'UE au Traité de Lisbonne, ce qui ne signifie aucunement que la concurrence n'existe plus. Elle devient un moyen reconnu mais plus un objectif. Cela devient : « une économie de marché ouverte où la concurrence est libre »

Mon postulat est que loin de la compétitivité et la concurrence acharnée, ce sont la complémentarité et l'utilité qu'il faudrait développer.
  • UTILITÉ ET SURABONDANCE

Surabondance versus bonheur
Une des lois de ce marché est la concurrence. Donc la création de produits/services capables 
-d'enrichir les entreprises le plus vite possible 
-de planifier leur remplacement par de nouveaux produits quasi similaires. 
D'où le scandale de l'obsolescence programmée pour forcer le remplacement. 
D'où aussi le scandale de la course à la nouveauté: avoir le dernier IPhone, la dernière paire de ski ou le dernier blouson à la mode, dont l'amélioration est souvent sans intérêt réel sinon la nouveauté.
En effet, l'utilité réelle des produits/services ainsi créés passe au second plan à partir du moment où les études de marché montrent qu'il existe un créneau disponible capable de susciter l'envie de consommer.
Envie largement manipulée par le marketing qui organise la stratégie générale marque/produit et la met en oeuvre à travers différentes techniques très efficaces comme la publicité, les réseaux sociaux, les relations publiques, le marketing direct, le merchandising. 
Avant ça s'appelait la propagande... (cf le fameux livre "propaganda - comment manipuler l'opinion en démocratie")

Or cette sur-consommation est inutile à notre bonheur d'occidentaux sur-équipés! Elle nous rend esclave du marché (le fameux "pouvoir d'achat") et est catastrophique pour la planète, en utilisant des ressources tant lors de la fabrication, qu'au niveau du transport, de l'utilisation et de la destruction (déchets).
Prenons un exemple simple de manipulation: les vêtements via la dictature de la mode. 
Soyons honnête, avons nous vraiment besoin d'une nouvelle veste alors que notre penderie regorge d'autres encore presque neuves? La mode a changé nous dira-t-on. Les cols larges sont ringards et nous serons ringards si nous continuons à porter l'ancienne veste au col large. Pour éviter cette humiliation, on devra acheter une nouvelle veste au col étroit... jusqu'au prochain revirement de la mode qui portera au pinâcle le retour aux cols larges! 
Cette envie d'être dans la norme est-elle synonyme de bonheur? De plaisir peut-être, ce plaisir de consommer que la publicité et les magasins savent déclencher à travers leurs vitrines alléchantes et étalages bien fournis.
De bonheur et d'utilité réelle, point!

Mais qu'est ce qui est réellement utile?
C'est une question que nombre d'entre nous se posent. Avec la remarque ironique "on va pas retourner à la bougie quand même!". Ou encore "y'a pas de mal à céder à ses envies".
Il y a une vingtaine d'années, j'aurais répondu que ce qui est utile c'est ce qui correspond à mes besoins, d'abord primaires (logement, nourriture, culture), mais aussi mes besoins secondaires, tous ces petits plaisirs de la vie que nous octroient l'achat d'une nouvelle paire de chaussures ou d'un aspirateur robotisé (vous savez, celui qui "délivre la femme de la corvée du ménage"!!).

Une prise de conscience
Même si je le reconnais, l'aspirateur robotisé me fait gagner du temps, le coût énergétique et l'impact carbone de cet aspirateur (en terme de fabrication, de transport, de recyclage de l'ancien et donc d'impact sur l'environnement) ne nous permet plus de changer de produit pour un simple caprice. De plus, est-il bien nécessaire de "gagner du temps", de tout faire de plus en plus vite?
On voit poindre aujourd'hui, une tendance à recycler, réparer, donner ou revendre les produits qu'on n'utilise plus. À acheter des produits de seconde main. À hésiter avant de changer un matériel qui fonctionne, par simple envie de nouveauté.
D'abord pour des raisons économiques, mais aussi par une prise de conscience de l'utilité réelle, par rapport au gâchis et au désastre environnemental d'une société qui pousse à la sur-abondance.
En effet, il n'y a pas de corrélation avérée entre richesse monétaire et matérielle d'une part et bonheur ou bien vivre de l'autre. 


  • COMPLEMENTARITÉ ET COMPÉTITION

Le monde de l'entreprise est truffé de mots guerriers: cible, objectifs, stratégie, adversaire, vainqueur, top ten boursier...
Le maître mot du monde de l'économie est compétition, au niveau de la progression de l'entreprise, mais aussi au niveau de sa gouvernance. Avec comme point de mire: gagner toujours plus d'argent.
Comment s'étonner alors de constater que ce monde soit devenu une jungle où le fort domine et le faible est exterminé ?
Comment s'étonner aussi que le monde du travail soit devenu un terrain de bataille où les salariés sont en compétition permanente les uns contre les autres, pour obtenir une augmentation, un poste plus important, un "tableau d'honneur" du meilleur vendeur, du meilleur serveur, du meilleur...

Et si on parlait de complémentarité?
Si les entreprises ne créaient de nouveaux produits ou services QUE si ils étaient complémentaires de ceux existant déjà... et donc utiles!
Et si les salariés pouvaient travailler et progresser ensemble, les uns avec les autres et non pas contre les autres... et donc solidaires!

        • POUR ALLER PLUS LOIN...
Revenons à mon postulat de départ : complémentarité et utilité, est-ce impossible rêverie? folle utopie? Et quelles en sont les clés?
L'entraide
La société de l'entraide a été théorisée par Kropotkine dans son livre "l'entraide un facteur de l'évolution" dans les années 20. Ce n'est donc pas une nouvelle lubie altermondialiste !  Plus récemment, Pablo Servigné renchérit sur la nécessité vitale (et naturelle) de la coopération dans son livre "l'entraide, l'autre loi de la jungle". Nombreuses associations et mouvements se réfèrent à ce concept, notamment dans cette période prélude à un effondrement annoncé, dans lequel sans entraide, notre survie sera un enfer.
La coopération
À l'opposé des "survivalistes", repliés sur leurs bunkers dorés, les "convivialistes" (art de vivre ensemble), dans leur manifeste, prônent une société où chacun tend la main à l'autre, parce que convaincus que c'est ensemble en coopérant qu'on pourra s'en sortir. 

Les moyens pour aller plus loin sont de trois ordres:
- éveiller les consciences pour que les peuples se lèvent,
- lutter contre les tenants de ce capitalisme débridé qui ne survit qu'avec son corollaire imbécile, la croissance,
- proposer une nouvelle organisation pour une société désirable... et vivable ! 

Et enfin vivre dignement.


 








2 commentaires:

  1. est ce que ces réflexions sont aussi valables pour les pauvres? on ne vit pas tous en état de surabondance Geneviève !

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    1. Tu as raison, il y a en effet des gens qui ne surconsomment pas tout simplement parce qu’ils n’en ont pas les moyens. Et pour ceux là, le revenu d’existence serait le bienvenu!

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